Le Conseil d’État a suspendu vendredi deux arrêtés fixant la répartition des sièges au sein de la métropole Aix-Marseille-Provence, empêchant l’entrée en fonction de la plus vaste intercommunalité de France, à la gestation laborieuse, jusqu’à une décision du Conseil constitutionnel.
« En attendant la décision du Conseil constitutionnel et les suites qu’il conviendra de lui donner, le futur conseil de la métropole d’Aix-Marseille-Provence ne peut donc pas siéger et les groupements de communes qui existent aujourd’hui peuvent continuer à fonctionner »,
a précisé la plus haute juridiction administrative dans un communiqué.
Saisi fin novembre, le Conseil constitutionnel doit rendre sa décision dans les trois mois. La métropole Aix-Marseille-Provence, la plus vaste de France, est censée, selon la loi, devenir une réalité le 1er janvier 2016. Elle regroupera 92 communes sur 3.173 km2 et comptera 1,83 million d’habitants. Elle a déjà un président, le sénateur-maire de Marseille Jean-Claude Gaudin (Les Républicains), élu début novembre président en dépit des recours déposés jusqu’au dernier moment par des élus opposés au projet, souvent du même bord politique que lui. Ils sont à l’origine du litige devant le Conseil d’État.
La balle est désormais dans le camp du Conseil constitutionnel, pour lever l’incertitude juridique sur la métropole, qui a fait craindre ces derniers mois, aux syndicats notamment, des problèmes dans le versement des salaires des fonctionnaires ou dans l’exécution des marchés publics après le 1er janvier.
Voulue par le gouvernement, construite laborieusement
Dans sa décision, le Conseil d’État souligne d’ailleurs qu’il faut éviter que le conseil de la métropole ne siège avant la décision constitutionnelle pour que la légalité de « ses premières décisions » – comme l’élection des vices-présidents, le vote du règlement intérieur, et autres règles de fonctionnement – ne puisse être « affectée ». En revanche, la prorogation si nécessaire en 2016 des intercommunalités existantes, qui devaient disparaître au 1er janvier, permettra d’éviter « une rupture de continuité dans l’exécution des services publics auxquels ceux-ci pourvoient », relèvent les sages. La question posée au conseil constitutionnel porte sur la constitutionnalité de dispositions sur la loi métropole du 27 janvier 2014. Les juges constitutionnels doivent se pencher sur un système d’attribution de sièges supplémentaires à certaines communes, qui fait craindre à des maires la prééminence de Marseille dans la métropole, et pourrait poser problème au regard du principe d’égalité devant le suffrage.
Voulue par le gouvernement, cette métropole s’est construite laborieusement. Elle doit permettre à ce territoire de rattraper un certain nombre de retards, pointés récemment encore par l’Insee: transports inefficaces et congestionnés, emploi et attractivité en berne, ou encore faible mixité sociale. Dans une réaction à l’AFP, la ministre de la Décentralisation Marylise Lebranchu a pris « acte de la décision du Conseil d’État » et dit attendre celle du Conseil constitutionnel. Jeudi, Mme Lebranchu s’était justement déplacée à Marseille pour une « conférence métropolitaine » censée acter le passage de flambeau de l’État et des différents partenaires aux élus locaux, et le passage aux projets concrets, après plusieurs années de travail institutionnel. Elle s’était dit « sereine » quant à la décision à venir du Conseil constitutionnel.